« LA
MUSIQUE
DOIT
RACONTER
UNE HISTOIRE »

 

Rencontre avec Pascale Kayser, professeure de danse sur glace et médaillée de Bronze aux Championnats de France de danse sur glace en 1981. Durant cette interview, on apprendra ce qui « patinable et non patinable »

 

Le choix de la musique est-il capital ou secondaire pour accompagner une chorégraphie ? 
Il est forcément capital mais, pour les jeunes patineurs, la musique est choisie selon leurs capacités. On prend des musiques connues pour que le public et les juges soient enjoués, mais également pour coller à leurs capacités. Il ne faut pas que la musique soit trop rapide pour des débutants. Pour les plus jeunes, ce sont généralement leurs professeurs qui choisissent, même s’ils les ont mis sur la piste de ce qu’ils préfèrent. 

Et pour les sportifs de haut niveau ? 
Souvent, les sportifs choisissent leurs musiques. Il faut être certain de son choix. Le programme, on le travaille longtemps, du mois d’août au mois de mai de l’année suivante. L’avis du sportif sur la musique est donc un critère très important.

Est-ce le seul critère de choix ?
Non évidemment, dans ce sport on a besoin de rythme et de changements de rythme. Il peut y avoir parfois certains rythmes imposés. Mais, pour les programmes libres, les choix sont libres, eux-aussi.

Est-ce que la chorégraphie est créée sur la musique choisie ou est-ce l’inverse ?
En règle générale, on pense la chorégraphie en fonction de la musique.

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Les danseurs sur glace clermontois Gabriella Papadakis et Guillaume Cizeron aux Championnats d’Europe 2018. © Mladen ANTONOV / AFP

 

En tant que professeure, quel serait le style de musique que vous privilégiez ?
Les patineurs les plus jeunes, en début de saison, nous présentent constamment des chansons actuelles. Or, les chansons actuelles, ce n’est juste pas possible. Il y a des normes à respecter. On va donc diriger les enfants sur des musiques de films, qu’ils connaissent de préférence, ou des musiques un peu folklores, type hindoues. Pour les plus grands, c’est vraiment très varié. Ils nous proposent des titres et on dit « oui, c’est patinable » ou « non, ce n’est pas patinable ». C’est patinable à partir du moment où il y a un certain rythme et une histoire possible. La musique doit pouvoir raconter une histoire. C’est pour cela que les musiques classiques et les musiques d’opéras sont très présentes. 

Existe-t-il des restrictions de choix pour le très haut niveau ?
Beaucoup moins qu’avant. Aujourd’hui, ils peuvent très bien choisir des mélodies ou des musiques chantées, alors qu’auparavant les musiques avec paroles étaient proscrites. Du coup, les sportifs de haut niveau choisissent en équilibrant deux critères : le critère stratégique et le critère d’appréciation de la musique. 

Est-ce que dans le critère stratégique, il y a l’anticipation de ce qu’aime ou pourrait aimer le public et, surtout, le jury ?
Surtout, pour les juges, oui, parce que ce sont les juges qui détermineront si les rythmes sont bien respectés, si les expressions sont posées sur les bonnes rythmiques. Le public est un critère pour les galas. Par exemple, pour la tournée de l’équipe de France de danse sur glace, les patineurs font quelques fois des morceaux de leurs programmes de l’année mais montrent également des choses techniquement hors normes, réalisées au cours de l’année. 

Que pensez-vous de l’autorisation récente des musiques avec paroles dans les compétitions de danse sur glace ?
C’est plutôt positif. Auparavant, c’était obligatoirement un choix des musiques des fédérations. Elles étaient vraiment rébarbatives et se répétaient terriblement. Aujourd’hui, on peut choisir une musique particulière et personnelle.

Fayssal Kadiri